Sauvegarde du Racou: “Lettre au maire d’Argeles”

Sauvegarde du Racou: “Lettre au maire d’Argeles”

Lettre envoyée à Monsieur le Maire d’Argeles sur Mer le 17 septembre 2017

Monsieur le Maire,
Vous nous avez fait l’honneur d’assister, le 8 juillet dernier, à la réunion d’information de l’Association pour la Sauvegarde du Racou, à l’hôtel restaurant « L’Oasis » au Racou. Un échange franc entre la Mairie et l’ASR a pu ainsi s’instaurer et nous vous en remercions.
Aujourd’hui, l’association ADREA ainsi qu’un collectif de résidents du Racou, se joignent à nous pour vous demander de protéger ce petit bout de plage auquel vous nous dites, vous-même, être très attaché.
Durant l’hiver 2016-2017, de simples coups de mer, qui n’ont rien eu d’exceptionnel, ont atteint la rue principale. La plage du RACOU a perdu 20 à 25 mètres de largeur, la hauteur du sable a encore diminué et la dune réalisée par les services de la commune n’a pas tenu. Que se passera-t-il en cas de tempête exceptionnelle comme Argelès en a subi plusieurs fois ces 20 dernières années ?
Les habitants du Racou comme les argelésiens, les catalans et les nombreux touristes attachés à ce site sont aujourd’hui parfaitement conscients de la disparition future du vieux village jusqu’à la rue centrale si aucune mesure de protection de la plage n’est réalisée. Les rapports de la société Sogreah (devenu Artelia), le Plan Etat- Région du LR, les rapports de l’université de Perpignan, les constats d’huissier successifs, ne laissent aucun doute là-dessus. Les prévisions les plus pessimistes du rapport Sogreah 2003 sont aujourd’hui dépassées et l’Etat pourrait à tout moment exproprier l’ensemble du vieux Racou comme il l’a fait sur la côte Atlantique. Une éventuelle procédure des services de l’Etat à l’encontre d’un ou de plusieurs riverains déboucherait sur une nouvelle délimitation du Domaine Public Maritime (DPM) pour l’ensemble du village. La municipalité ne peut faire abstraction de ce risque et se désintéresser des conséquences d’une telle décision.
Pourtant, nous savons que ce site « remarquable » et « emblématique » de la commune d’Argelès représente un capital environnemental et touristique donc économique majeur pour la commune. Fort de sa réputation bien au-delà du département, le Racou est devenue, année après année, la plage la plus médiatisée et la plus prisée d’Argelès.
Nous nous interrogeons sur les véritables raisons qui pousseraient la commune à se désengager de sa protection pénalisant à la fois les argelésiens, les amoureux du Racou (catalans et touristes) et les résidents. Une chose est certaine, ce n’est pas uniquement à cause d’un problème de financement (les réparations cumulées des digues portuaires atteindront 10 M€), ni dû à un blocage par les services de l’Etat (les autres communes littorales protègent de fait leur patrimoine), ni consécutif à un manque de solution technique (que nous aborderons ci-après).
Pouvons-nous rappeler qu’il y a une quinzaine d’années la commune avait même refusé certains financements du Conseil Général, du Conseil Régional du LR, et de « Pays Pyrénées Méditerranée » (M.H. Sicre).
Nos associations sont à la disposition de vos services pour discuter de toutes les solutions pouvant être mises en oeuvre pour protéger la plage. Notre connaissance des problèmes du Racou et des solutions à y apporter tient, plus qu’à nos observations personnelles depuis deux décennies, à la participation de notre association à de multiples réunions de concertation sur ce sujet, avant 2003, regroupant les représentants de la commune et de l’Etat, les experts de la Sogreah, l’ASR et ses propres experts universitaires (Professeurs de sédimentologie et de génie maritime).Tout récemment, en septembre, une thèse a été tenue à l’université de Perpignan sur l’érosion du littoral en Languedoc-Roussillon.
De toutes les solutions étudiées, la plus pertinente, sans impact négatif sur l’environnement, est la construction d’une butée de pied (ou digue immergée) au niveau des 250 derniers mètres au sud de la plage suivi d’un rechargement en sable. Trois actions peuvent être menées dans un plan d’ensemble :
A très court terme, à titre conservatoire et seulement transitoire, un transfert de sable provenant du nord de la plage et de la zone d’enracinement de la digue sud vers le sud du Racou pourrait être rapidement effectué. Il existe, en effet, en fonction de la direction des vents (Tramontane ou vent de S-E) un balancement permanent de sédiments entre le nord et le sud de la plage élargissant alternativement une des deux extrémités. Les coups de mer de l’hiver dernier ayant concentré beaucoup de sable vers le nord alors que cette zone ne présente aucune habitation en arrière, un prélèvement pourrait y être réalisé pour réensabler la partie sud. Evidemment, le sable apporté en hiver dans les rues du Racou pourrait compléter ce rechargement mais son volume est par trop limité. Bien que tous les travaux répétés sur une plage (transferts de sable, reprofilage estival, cribleuse, création d’une dune artificielle) déstabilisent profondément la plage et favorisent son érosion, nous ne voyons pas d’autre solution immédiate pour atténuer l’impact d’un prochain coup de mer dans la partie sud.
-A moyen terme, (en 2018), Un prélèvement de sable au large par une drague suceuse, comme cela a été réalisé par exemple à Sainte-Marie le printemps dernier, serait une bonne solution. Cela nécessite cependant certaines autorisations, une étude d’impact et un gisement de sable de même granulométrie. Ce prélèvement serait à rechercher au large ; Un premier gisement, d’importance limitée, semble se trouver à proximité de la digue sud et à l’entrée du port.
-A plus long terme, (2019-2020), la construction d’une digue immergée ou butée de pied de 250 m de long accrochée aux rochers du Racou pour atténuer la houle et retenir le rechargement en sable. Elle n’aurait aucun effet négatif sur les plages environnantes puisqu’elle se trouverait au départ de la côte rocheuse.
A cette fin, nous vous proposons de participer avec la commune au montage d’un PAPI (Programme d’Actions de Prévention des Inondations) comme l’ont fait de nombreuses communes littorales. Ce programme vise à réduire les conséquences des inondations sur les territoires à travers une approche globale du risque portée par un partenariat entre les services de l’Etat et les acteurs locaux. Le dossier pourrait être présenté au conseil général des PO et au conseil régional d’Occitanie qui a un plan très ambitieux pour sa façade méditerranéenne.
Sur un plan financier, outre les aides principales (Europe, Etat, Région, Département), certaines pistes locales peuvent être envisagées :
-Rendre payant, en été, le stationnement au Racou, place de la Sardane, pour les touristes comme cela a été réalisé dans de nombreux villages du littoral et même à Argelès, tout en laissant le parking du Valmarie gratuit. Une telle décision financerait à elle seule, sur 20 ans, la moitié du coût de construction d’une digue immergée
-Réorienter vers un réensablement le projet de financements envisagé pour l’installation d’une caméra sur la colline (proposition du BRGM). Le nombre et la qualité des rapports déjà réalisés ne paraissent pas justifier une telle étude.
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Si les services de l’Etat s’appuient sur le droit (Limite du Domaine Public Maritime) et dans l’intérêt commun de la nation, Ils interviennent aussi en réponse aux sollicitations des collectivités territoriales. C’est pourquoi l’initiative première dans cette affaire relève de la municipalité. Même si l’Etat tend actuellement à repousser indéfiniment le problème d’érosion de nos côtes, c’est à la Mairie de se battre pour sauvegarder les sites qu’elle considère emblématiques pour sa commune. Nous espérons tous un engagement fort de votre municipalité en faveur de la protection de la plage. Nous restons à votre disposition et serons particulièrement reconnaissants de votre action en faveur du Racou.
Veuillez agréer Monsieur le Maire l’expression de toute notre considération.
Association pour la Sauvegarde du Racou
Michel GUIU

Association de Défense des Résidents et de l’Environnement
d’Argelès-sur-Mer, la Plage et le Racou
Etienne DUMAS

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